J'observe l'immeuble en face. Je me demande pourquoi la façade est ensoleillée alors qu'il me semble qu'elle est orientée au nord. Je me dis que le soleil doit venir de l'est, mais l'éclairer cependant par le côté et que l'allure de l'ombre me renseignera pour vérifier. Effectivement l'ombre s'allonge, s'étire, se dilate, elle m'indique que la façade est bien orientée au nord.
Par évocation, je me mets à penser aux ombres puis à leur représentation en peinture. Je pense aux couleurs complémentaires, je me dis que si je devais faire une peinture de cette façade je m'amuserais à la peindre en jaune avec des ombres violettes. Ensuite je pense à Picasso et à la célébrité de certains peintres modernes. La plupart ont tâtonné puis peu à peu ont édicté un ou plusieurs critères qui correspondaient à leur envie profonde (peindre en extérieur et capter la lumière, dessiner comme un enfant, susciter une réaction...). Alors ils s'y sont tenus jusqu'à leur mort avec parfois des périodes d'expression différente, comme pour tester leur envie-fil-conducteur. A l'intérieur de ce cadre, tout est permis, ce qui rendra chaque toile unique.
Cela m'évoque le cadre de développement de logiciels nommé Scrum (= "mêlée", terme emprunté au rugby). Périmètre à l'intérieur duquel l'agilité est valorisée. Le mélange subtil d'adaptabilité et de règles comprises par chacun des acteurs permet de faire aboutir des projets de logiciels complexes voire très complexes.
Et si nous nous inspirions des peintres modernes et de Scrum pour élever nos enfants ? En fixant un cadre à l'intérieur duquel l'enfant pourra être créatif, se sentir libre et protégé. Certains enfants s'arrêtent bien avant le cadre, d'autres s'arrêtent pile au cadre et d'autres encore remettent régulièrement en cause le cadre. Avec ces enfants-là [et en général la plupart sont concernés au moment de l'adolescence], cela vaut le coup d'être au clair avec soi-même et avec l'autre parent. Il y a la loi, le système judiciaire du pays, non transigible (on peut leur montrer les gros livres rouges en médiathèque). Il y a des textes anciens suivis par des milliards de gens depuis des millénaires car favorisant le bien vivre ensemble (ancien testament, Bhagavad-Gita...). Et puis il y a des subtilités liées à la culture, l'éducation qu'on a soi-même reçue, on arrive alors dans ce qui est davantage négociable.
C'est fatigant d'être parent, on passe beaucoup de temps à répéter alors autant être à l'aise avec son texte !
Pour F.G.